mardi 14 mai 2019

Lettres des tranchées @


Tranchée avec fortification allemande, au Linge - Vosges
Les tranchées étaient le sentier fortifié du front de bataille. Elles étaient à la fois une construction défensive et offensive. Elles étaient la maison, les voies de communication, les toilettes. Là, on mangeait, on se rasait, on partageait les peurs, les envies. Là, on rêvait aussi et regardait le temps passer, l’attente de la mort ou l’espoir et la chance de survivre à cet enfer. Et le temps passait et passait et passait. Dans les tranchées, les soldats étaient déjà sous la terre dans une attente qui rendait la creuse du terrain comme leur propre tombe.
Entre 5  et 6 millions de lettres sortaient des lignes françaises chaque jour. Des plumes de ces combattants sortait le sang versé à chaque instant. Autant de vies qui révélaient leurs âmes : leur révolte, leur anxiété, leur terreur et aussi leur courage, leur détermination, leur volonté de survivre. Ces lettres devenues documents révélaient parfois la lâcheté mais aussi la camaraderie, l’amitié et l’amour pour la famille, pour la patrie. Histoires d’âme, de dévotion et de la recherche de la foi, de Dieu.

La mort annoncée  Je ne veux pas manquer au rendez-vous que la mort m’a peut-être donné dans les Vosges. Si vraiment je la trouve, il n’y aura rien d’autre qu’une pauvre croix au coin d’un champ d’Alsace.
Pierre Logerot, Aspirant aux Chasseurs Alpins, tombé dans les Vosges, à l'âge de 21 ans. Il est mort en se portant au secours d'un camarade blessé.


Tranchée au Linge - Vosges
Ces croix de bois et les faits surhumains qu’elles commémorent rendent la montagne des Vosges méconnaissable. Tout restant le même, tout y est changé, transfiguré. Jusqu’alors nous jouissions de leur paisible majesté, sans y être distrait par aucun détail, ni arraché à l’impression d’ensemble. C’était chaque année, au moment des vacances, comme si nous venions nous reposer dans un rêve hors du temps. Les montagnes nous délivrent de nos soucis et de nous pensées personnelles, et, à la manière d’une grande composition musicale, nous soustrayait au monde des querelles et de l’égoïsme, pour nous introduire dans le règne de la nature. Mais aujourd'hui, c'est dans un monde supérieur encore qu'elles nous élèvent. La mort vient d'y ranimer la vie. Ces montagnes, hier immobiles, insensibles, sont pleines d'âme. Derrière la nature visible, on entend palpiter le monde héroïque, l'ivresse enthousiaste du dévouement, le mépris de la mort, 'invincible espérance.
Maurice Barrés, défenseur passionné de l’Alsace-Lorraine française.


L’absence de Dieu ? Si plusieurs ont pensé que Dieu a été le Grand Absent, la vérité c’est qu’il y était. Et Dieu a été, toujours, en souffrance. Les guerres des hommes ne sont pas champ de bataille de Dieu. Son terrain à lui c’est l’âme des hommes, néanmoins la vie physique des femmes, des enfants, des vieux, à la fin, des hommes c’est le bien être céleste. Dieu ne cherche pas la souffrance humaine, mais souvent Il l'utilise pour que l’homme sente qu’il a besoin du Dieu créateur et soutenant.

Tranchée en maquette - Abri de Guerre, Uffholtz - Alsace


Prières en prose

Du plus profond de la tranchée
Nous élevons les mains vers vous
Seigneur : Ayez pitié de nous
Et de notre âme desséchée !
Car plus encore que notre chair
Notre âme est lasse et sans courage.
Sur nous s'est abattu l'orage
Des eaux, de la flamme et du fer,
Vous nous voyez couverts de boue
Déchirés, hâves et rendus...
Mais nos cœurs, les avez-vous vus ?
Et faut-il, mon Dieu, qu'on l'avoue,
Nous sommes si privés d'espoir
La paix est toujours si lointaine
Que parfois nous savons à peine
Où se trouve notre devoir.
Éclairez-nous dans ce marasme
Réconfortez-nous et chassez
L'angoisse des cœurs harassés
Ah ! rendez-nous l'enthousiasme !
Mais aux morts, qui ont tous été
Couchés dans la glaise et le sable
Donnez le repos ineffable,
Seigneur ! Ils l'ont bien mérité.
Jean-Marc Bernard, tué le 9 juillet 1915

Marc Doval
Après m'être confessé des fautes de ma vie le 19 Juillet au soir, et vous avoir reçu dans mon cœur par la communion le 20 Juillet au matin, Seigneur, permettez-moi, malgré mon indignité et en considération des mérites de votre Divin Fils, de me confier à vous. Veillez sur moi dans la lutte qui commence et préservez-moi de tout mal. Mais que votre sainte volonté soit faite avant tout ! Si vous voulez que je retourne sain et sauf, soyez béni ; si vous voulez que je souffre, soyez mille fois béni ; si vous voulez de ma vie, soyez encore béni, elle est à vous, je vous la rends.
Marc Doval, tué le 8 août 1916 au Linge

Croix posé symboliquement pour Marc Doval
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